À Saoû, dans la Drôme, Inès de Rancourt et Daniel Gilles, du GAEC La Chèvre qui Saoûrit, produisent des Picodons bio : un petit fromage de chèvre plat typique de la région. Visite.
7h30. Après avoir récupéré des viennoiseries à la boulangerie du coin, arrivée chez Inès de Rancourt et Daniel Gilles. Dans le hangar, à la sortie du village de Saoû, les 55 chèvres de race Alpine se préparent pour la traite. En une quinzaine de jours, leur lait sera transformé en Picodon, un petit fromage fermier au lait cru dont l’Appellation d’Origine Protégée (AOP) compte environ 150 producteurs répartis au sud-est de la France, sur la Drôme, l’Ardèche ainsi que les cantons de Valréas et de Barjac.
Bon sens paysan
« Tous les matins, je rejoins les chèvres vers 8h. Chacune d’entre elles produit quotidiennement trois litres de lait, mais en ce moment nous partageons le fruit de la traite avec les chevreaux. Entre eux et nous, c’est à celui qui se lève le plus tôt ! », plaisante Daniel Gilles, installé en élevage caprin depuis une dizaine d’années. « Ils sont sevrés lorsqu’ils atteignent quinze kilos. Nous en gardons une vingtaine. Les autres sont vendus à des particuliers, des restaurateurs ou bien transformés par nos soins », poursuit sa femme Inès, débordante d’énergie et de passion. Le couple est quasi autonome sur l’alimentation du cheptel. Daniel cultive de l’orge et du foin qui viennent complémenter l’herbe que les chèvres ingurgitent lorsqu’elles sont dehors. Si le temps le permet, le troupeau paît sur les parcelles environnantes. Inès les conduit aussi dans la forêt de Saoû pour que celles-ci se dégourdissent les pattes et profitent de la végétation. « Le lait est plus riche à la mise à l’herbe au printemps et à l’automne, quand les chèvres mangent les glands », précise-t-elle.
Du lait aux palets
Chez Inès et Daniel, l’accouplement est naturel : en août, le bouc est introduit auprès du troupeau de femelles… Selon les années, les mises bas débutent autour du mois de février. La lactation et la production de fromage reprennent alors. Chaque jour, la traite dure environ une heure et demie. Les chèvres se relaient, avant de rejoindre leurs petits, le tout sous l’œil insaisissable de Ying, vieux chien de berger. Le lait collecté est ensuite mélangé à une partie du liquide ou lactosérum issu du caillage de la veille, le petit-lait. Lorsque la préparation a refroidi à 20°C, Daniel et Inès y ajoutent un coagulant, la présure, qui vient la figer et permet d’obtenir un caillé. « Le lendemain, on verse ce caillé dans des moules à faisselle. Un ou deux jours plus tard, les fromages sont démoulés, salés et mis à sécher sur des grilles. Enfin, ils rejoignent le hâloir où ils sont affinés. C’est à ce moment-là que la flore se développe. C’est elle, grâce à l’environnement microbien de notre fromagerie, qui fait l’identité de notre travail et assure la singularité de nos Picodons », explique Inès. Pour se réclamer de l’AOP, les fromages doivent être affinés au minimum quatorze jours. Une fois prêts, Inès de Rancourt et Daniel Gilles vendent tous les samedis leurs fromages bio, à la robe écrue, sur le petit marché de Saoû, à l’abri des platanes. Un voyage en soi. Sans parler du goût de leurs palets, légèrement noiseté et piquant. Un délice, sur un Saint-Joseph blanc, en particulier aux beaux jours…
La Chèvre Qui Saoûrit
180, route de Crest, 26400 Saoû
Vente à la ferme tous les matins et, sur le marché de Saoû, le samedi matin.
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